L’enquête de l’employeur en cas de harcèlement moral n’a pas à associer les élus du personnel

À la suite d’une dénonciation de harcèlement moral, l’employeur doit obligatoirement déclencher une enquête interne.

En effet l’employeur doit prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir ou de faire cesser les agissements de harcèlement moral. Il a, en la matière, une obligation de sécurité.

Cette enquête peut être limitée à seulement une partie des collaborateurs du salarié accusé de harcèlement et peut être menée par la direction des ressources humaines sans que les représentants du personnel soient associés.

La Cour de cassation avait déjà précisé qu’une telle enquête n’était pas soumise au principe du contradictoire, de sorte qu’elle peut être réalisée à l’insu du salarié et sans entendre ses explications (Cass. soc. 17 mars 2021, n° 18-25597), et qu’il n’est pas nécessaire d’auditionner tous les collaborateurs du salarié auquel des agissements de harcèlement moral sont reprochés (Cass. soc. 8 janvier 2020, n° 18-20151).

Dans un arrêt du 1er juin 2022, la Cour de cassation s’exprime à nouveau sur les modalités de l’enquête en cas de harcèlement moral.

Dans cette affaire, un salarié était soupçonné de faits de harcèlement moral sur une de ses collègues. Sur la base d’une enquête interne menée par la direction des ressources humaines (DRH), le salarié avait été licencié pour faute grave. Le salarié avait saisi la justice pour contester le bien-fondé de son licenciement.

La cour d‘appel avait considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, les juges d’appel avaient refusé d’analyser le contenu de l’enquête interne diligentée par l’employeur en retenant que :

  • l’enquête avait été confiée à la DRH et pas au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (à l’époque des faits, aujourd’hui remplacé par le comité social et économique) ;
  • seulement 8 personnes sur les 20 salariés du service avaient été interrogées sans que les critères objectifs de sélection des témoins soient connus.

La Cour de cassation casse leur décision et rappelle que tout jugement doit être motivé. Les juges du fond doivent donc examiner tous les éléments de preuve présentés. En l’espèce, l’enquête interne était un élément de preuve produit par l’employeur, en vue de justifier le licenciement pour faute grave du salarié lié à des faits de harcèlement moral.

Le fait que cette enquête ait été menée par la DRH et non par les représentants du personnel ou sans y les avoir associés, auprès d’une partie seulement des collaborateurs du salarié accusé de harcèlement et que les critères objectifs de sélection des témoins aient été inconnus ne permettait pas de l’écarter.

Les juges d’appel ne pouvaient donc pas déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse sans examiner cet élément de preuve.

L’affaire sera rejugée devant un autre cour d‘appel.

Cass. soc. 1er juin 2022, n°20-22 .058

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