Le statut de cadre dirigeant permet aux entreprises de ne pas décompter le temps de travail de certains de leurs cadres, sous certaines conditions très strictes.
- se voir confier « des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps;
- être habilités à prendre des décisions de façon largement autonome;
- percevoir une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. » (Article L.3111-2 du Code du travail)
A ces conditions, la jurisprudence en ajoute une supplémentaire : participer effectivement à la direction de l’entreprise.
Dans un dossier suivi par le Cabinet jusqu’aux portes de la Cour de cassation, il était question de l’appréciation de cette notion.
Les demandes du salarié s’élevaient à plus de 200.000€ au titre notamment des heures supplémentaires qu’il estimait avoir effectuées, des congés payés sur heures supplémentaires, et des dommages et intérêts pour perte du repos compensateur. Son argument majeur : il prétendait qu’il ne participait pas réellement à la direction de l’entreprise.
Après d’une procédure judiciaire de plus de 10 ans, la Cour de cassation a définitivement tranché le litige, en apportant des précisions sur la notion de cadre dirigeant dans les Antilles :
« La Cour d’appel [de Basse-Terre], qui a constaté que le salarié disposait d’une totale indépendance dans son emploi du temps, que le montant de sa rémunération était l’un des plus élevés de la société, qu’il était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome en ce qu’il était décisionnaire dans le recrutement de l’agence martiniquaise, dans la gestion des impayés et du contentieux mais qu’il l’était également dans les engagements financiers de la société, au sujet des taux de rétrocession impactant la marge commerciale, qu’il était directeur financier et avait délégation pour négocier les contrats qui ne se limitaient pas à la Martinique, qu’il gérait les opérations publicitaires pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane sans copie au PDG, a, sans limiter son appréciation à la compétence exclusive du salarié dans le cadre de l’agence locale, retenu qu’il ressortait de l’ensemble de ces éléments que le salarié participait effectivement à la direction de la société. »
La Chambre sociale de la Cour de cassation considère donc qu’un directeur financier employé par une société martiniquaise et gérant des opérations pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, sans copie au PDG, peut être à juste titre considéré comme un cadre dirigeant, et son temps de travail peut ne pas être décompté.
L’arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation a été rendu sous le n°19-25.719, le 13 avril 2022, et sera prochainement publié sur légifrance.